je vais faire un petit tour

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dimanche, février 04, 2007

T?en veux encore un peu ?

C'était un jeudi. Il faisait beau comme d'habitude ici. Nous étions invités à manger chez Vilna et Doudou. Echange de bon procédé, c'est nous (ou plutôt Magali?)qui avions préparé à manger. Des lasagnes. Des goûts nouveaux? Une petite demi-heure de marche à pieds entre les mornes et nous arrivons devant la petite maison (3 pièces pour un couple et trois grands enfants qui dorment dans le même lit) entouré d'un grand terrain où poussent bananiers, manguiers, cocotiers, ?

Accueil souriant. Embrassades. Les chaises sont sorties pour nous sur le petit perron abrité. Les enfants du coin arrivent pour pouvoir jouer avec Tahis et Gaïa. On discute. Je donne le linge du bateau à laver. Je remontre à Jean Wiltord, le frère de Vilna, comment se servir de son nouvel appareil photo qu'il a trouvé je ne sais où. En échange, je lui demande de collecter toutes les piles usagées qui traînent dans le village et chez les voisins. On boit. On parle. On rigole. Ça change de l'ambiance du puits. On est bien chez vous?

Arrive l'heure de manger. Magali sort le grand plat. Vilna commence à nous servir. On leur dit « vous d'abord ». Elle sert ses enfants, Doudou, son frère, sa mère, deux voisins qui sont là, et puis les enfants des voisins. Chacun se délecte. Chacun dévore. Devant le spectacle, on décide chacun de notre côté de ne pas manger. « C'est bon, allez-y, manger. Nous on a des réserves? »

Le spectacle, s'il s'agit vraiment d'un spectacle ? peut-être celui de leur vie que l'on croise, finalement ?, est vraiment saisissant. Ce n'est pas de l'appétit, c'est de la faim. La vraie, celle qui vient du tréfonds des tripes. Celle qui dit que l'on manque de tout. Celle qui dit que l'on nous a oublié. Mon petit creux passe facilement. On peut bien jeûner un petit peu. Dans le plat, il ne reste plus rien. Doudou et sa fille aînée ont tout raclé.

Le sourire est sur tous les visages. Chacun est repu. Digestion. Discussion. Sourire. Rigolade. Doudou nous propose une noix de coco. On l'accepte avec joie. Le lait de coco, sa chair, c'est bon, c'est nourrissant. On parle de tout, surtout des difficultés de leur vie. Le prix de l'école. La chape de béton qui se fend dans la chambre conjugale. Les chaussures qui viennent de lâcher. Du travail qu'il n'y a pas. De la pluie qui ne vient pas. Des dents qui fond mal. Du dentiste qui coûtent cher, très cher.

On se quitte en fin d'après-midi, juste avant qu'il soit trop tard pour parcourir le chemin avant la nuit. Nous sommes souriant d'une belle journée passée mais aussi atterrer par ce que l'on a vu. Je crois que l'image de ce repas ne nous quittera pas de sitôt. Pourtant, Vilna et Doudou sont, je crois des privilégiés. Ils ont reçu de la vie la volonté de s'en sortir, d'aller vers les autres pour s'en sortir, de ne pas laisser le terrain sans cultures, une réflexion que d'autres n'ont pas.

Le surlendemain, je fais mon premier day-charter avec Grand Citron Vert. Un couple de Québécois qui habite aux Cayes. Lui travaille dans le micro crédit accompagné (aide à la gestion, aide aux choix,?). Il a travaillé auparavant en Afrique et en Arménie. Ils sont charmants. Après deux long bords vent de travers, on mouille sous le vent d'une petite île habitée par des pêcheurs. Repas cossu. Il reste suffisamment pour nous nourrir, Lifen, Jakson, les deux Haïtiens que j'ai embauché pour ces sorties, et moi. Séjour à la plage de mes « clients ». Je débarrasse. Du riz, de la viande, reste dans les assiettes? Je jette avec dégoût. Un pêcheur passe pour demander à manger. Je lui donne le reste de riz. Largement pour quatre adultes. Je suis songeur. Asi es la vida?

A tout à l'heure