je vais faire un petit tour

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lundi, mars 13, 2006

Cafayate...

Cafayate est une île. La montagne est son océan. Et comme tous les îliens, ces habitants sont jaloux de leur lieu de vie. Ils veulent le préserver. Ils voient d'un mauvais oeil ceux qui veulent se l'accaparer, faire de l'argent avec son environnement. Ainsi, Emma et ses frères, Sergio, Julio, Marcos, sa belle soeur Guadalupe et la petite Valentina (18 mois), tous entre vingt et trente ans, n'ont pas aimé l'arrivée de Porteños (habitants de Buenos Aires), il y a quelques années. Ils ont ouvert des hôtels et des agences de voyages, attirés les touristes, sans que personnes sur place n'en profite. Ils ont décidé d'agir avec leurs petits moyens mais avec une volonté de fer. D'entrée en quelque sorte en résistance (je ne sais si c'est lié mais ils s'appellent De Guevara...) De la grande maison familiale, à deux pas du marché et à trois de la place centrale, ils ont fait un hospedaje convivial, avec des prix plus proche de la réalité que ceux proposés par leurs concurrents. Le succès aidant, ils ont acheté une cammionette pour emmener leur client découvrir les trésors des vallées environnantes puis ouvert une agence.
Cela fait à présent deux ans aujourd´hui. Ils ont à présent trois cammionnettes et l'hospedaje ne désemplit pas. Ce qu'ils ont de plus que les autres, c'est l'envie de faire découvrir à ceux qui passent leur endroit de vie, là où ils sont nés, la terre qu'ils aiment. Ils le font toujours avec le sourire et avec ce petit plus qui fait que l'on est séduit tout de suite, que la méfiance première que l'on a quant on se fait abordé à la descente du bus disparaît très vite. On sent tout de suite la sincérité des propos.
Ainsi, Sergio, lors des visites dans la quebrada, n'hésite pas à pousser la chansonnette avec sa guitare pour que l'instant soit encore plus magique. Le même Sergio aime à rejoindre la terrasse au-dessus de la maison, dominant tout le village, pour discuter et chanter avec les touristes qui y profitent de la douceur de la soirée. Pour la visite des Bodégas (les viticulteurs), ils ont choisit les amis, ceux qui sont installés ici depuis le XIXe siècle. Pour la petite rando jusqu'au cascade, un lieu magnifique où l'ont grimpe dans une vallée étroite tapissée de cactus jusqu´à une haute cascade qui domine un petit cirque, c'est Nico, enfant de la montagne, qui vit habituellement dans un village à dix heures de marche dans la montagne, qui joue au guide, sachant partager avec passion et simplicité tout ce qu'il aime dans la vie, son milieu naturel. Les restaurants conseillés sont ceux des amis, ceux qu'ils ont toujours connus, autrement sympathiques que les lieux ouverts par ceux venus d'ailleurs et attirés par l'augmentation de la fréquentation touristique et l'argent qui va avec.
Evidemment cette résistance bien sympathique et passionné entraîne, quelque fois, des dérapages dans le discours, comme pour Sergio, un latin au sang chaud, qui n'hésite pas à affirmer à des Porteñas que la culture de l'Amérique latine commence ici et que le reste de l'Argentine n'en fait pas partie parce que trop européenne. Il n'a pas forcément tort dans le fond, mais la manière est par trop maladroite et passionnée. Le rejet n'a jamais rien protégé, surtout pas une culture.
Malgré tout, cette passion qu'ils ont tous à agir, leur professionnalisme étonnant, cette ouverture vers les autres et le respect qu'ils en ont, font d'El Balcon, le nom de l'hospedaje, un lieu éminemment sympathique où on ne regrette pas de s'être arrêté. Je n'oublierai pas les grands sourires de Marcos, me tapant dans la mains en me disant "Choco los dos" (give me five...) parce que je l'appelle - et qu'il aime se faire appeler - "Commandante Marcos". Je n'oublierai pas ce lieu plein de vie et de bonnes ondes. Je n'oublierai pas le regard intense d'Emma, avec dans ses bras la petite Valentina, m'expliquant qu'il ne pouvait pas laisser leur village aux mains d'autres personnes que les natifs, n'hésitant pas à pratiquer des prix bien en-dessous de ceux des autres parce que ils sont suffisant pour bien vivre ici. Une jolie leçon... Je n'oublierai pas tous ces bons moments vécu ici, dans ce lieu si riche.
Je vous l'ai déjà écrit, je me sens bien ici. Mais je pars demain parce que d'autres lieux m'attendent, d'autres Emma, d'autres Sergio, d'autres Nico, qui seront encore mieux me faire comprendre leur vie, qui seront encore m'enrichir de nouvelles expériences, de nouveaux moments merveilleux. Merci encore à vous. Ce soir, on va fêter la pleine lune dans les dunes avec la guitare évidemment. Ce sera une belle fin...
A tout à l'heure